18 Mars 2010
En 1974, Edouard Leclerc a publié chez Belfond "Ma vie pour un combat" dans lequel il revient sur l'Occupation et donne sa propre version des faits au sujet de son comportement durant cette période. Co-auteur des Chroniques de la guerre 1939-1945 dans le Finistère en six volumes, l'historien Joël Le Bras a analysé certains passages de cet ouvrage au regard des documents d'époque qui ont depuis été mis au jour. Il en ressort que dans son autobiographie, Edouard Leclerc enchaîne les mensonges. J'avais déjà évoqué dans ma note du 16 février ce qu'il présentait comme "la preuve de son innocence" alors que dans la réalité, il a été déclaré "irresponsable de ses actes". Autrement dit, son innocence n'a jamais été prouvée : tout simplement parce que le certificat médical (émis dans les conditions que l'on sait maintenant) a mis fin à l'instruction et annulé le jugement prévu.
Joël Le Bras pointe en outre cinq autres contre-vérités :
- dans son livre, Leclerc écrit "le gosse que j'étais" ou encore "j'avais tout juste 16 ans au moment des faits qui me sont reprochés". En réalité, né le 20 novembre 1926, il a 17 ans et demi en avril 1944. Est-ce pour minimiser ses actes qu'il se rajeunit ainsi ?
- Leclerc dit ne pas savoir si l'Allemand Schaad, avec lequel il était en relation, appartenait à la Gestapo. Il aurait fallu être aveugle en pénétrant régulièrement au manoir de Colleville - où Schaad était établi - pour ne pas comprendre que l'on entrait dans l'antre de la Gestapo locale. Tout un chacun savait, à Landerneau, ce qui se passait derrière les murs du manoir.
- Leclerc écrit : "mes conversations avec l'adjudant Schaad ne quittèrent jamais le terrain de la banalité." Faux, bien sûr. Peut-on croire par exemple que c'était uniquement pour prendre de ses nouvelles que Schaad lui demandait régulièrement "Connaissez-vous untel ?"
- Leclerc soutient une thèse dans son autobiographie selon laquelle il dénonçait en fait des pétainistes. Nouvelle erreur : Leclerc se trompe de quelques mois. C'est après la Libération que l'on s'est mis à dénoncer des pétainistes...
- Leclerc dit que c'est "en compensation" de sa détention qu'il a été exempté de service militaire. Là encore, son mensonge est évident. C'est l'examen psychiatrique qui, de facto, a entraîné son inaptitude au service militaire et en aucun cas une volonté de le "dédommager" de son emprisonnement.